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Canal latéral

J'ai passé pas loin de 20 ans à arpenter régulièrement une toute petite portion du Canal Latéral. Ce canal un peu à part, qui relie Toulouse à l’Atlantique depuis les Ponts Jumeaux. C’est ici, sur une distance de moins de 3 km, que j’ai recueilli la totalité des images présentées dans cette série.
Avec l'atout de la longue durée pour compenser la contrainte de la très courte distance.
J’y ai vu passer des quantités de personnes, installées de manière plus ou moins permanente en divers logis précaires : tentes, caravanes, cabanes ou simples abris faits de bâches, tôles, cartons, palettes et parpaings…
Celles et ceux qu'on appelle par facilité des SDF sont le plus souvent arrivés avec leur chien, leur dernier compagnon d’échouage. Mais la vie s’y est néanmoins reconstruite, en communautés aléatoires plus ou moins éphémères, ou sinon dans le repli de l’ermite. Et le plus souvent en entretenant de bonnes relations de voisinage avec les autres usagers de ces berges du canal: mariniers, promeneurs, cyclistes, pêcheurs, joggers, kayakistes...
Des artistes graffeurs ont ajouté leurs images éphémères sur les murs lépreux de cette friche industrielle.
Puis le temps lui aussi a fait son oeuvre : tentes abandonnées avant d'être happées par la végétation, foyers en galets définitivement éteints, commodités délaissées, croix tristes et dérisoires parsemées ici et là en souvenir de l’animal qui tenait chaud au coeur et au corps.
Phil est mort à l'automne 2016. C'était sous son pont reliant le quartier des Minimes à la rocade mon principal fil conducteur, mon repère, mon pote. Son corps a été retrouvé en amont de son dernier port, dans les eaux du canal latéral. J'étais parmi ses innombrables amis et voisins d’infortune venus saluer sa mémoire au carré des indigents de Cornebarrieu.
Ce furent là mes dernières photographies des habitants du Canal Latéral.